梅庵琴譜 Mei’an qinpu

À l’heure où les méthodes d’apprentissage du qin prolifèrent sur Internet, il n’est pas mauvais de se pencher sur les efforts pionniers des maîtres du siècle dernier, désireux de s’adresser à un public plus large que celui du seul cénacle des cercles d’amateurs.

Le premier en date de ces ouvrages, le recueil de mélodies de l’école de Mei’an 梅庵琴譜, publié en 1931, se distingue de ses prédécesseurs par une approche délibérément «moderne» mettant l’accent avant tout sur la dimension purement musicale des oeuvres avec une annotation claire du rythme et des hauteurs. Pour ne pas encombrer le néophyte, les indications «extra-musicales» telles que  préfaces explicatives, paroles, poèmes et autres textes d’accompagnement sont réduits au minimum.

Malgré cet effort de simplification, cet ouvrage très populaire, maintes fois réédité (et traduit en anglais par le musicologue américain Fredric Liberman sous le titre «A Chinese Zither Tutor») reste, malgré tout, le fait d’une école particulière, ne différant pas en cela de la plupart des publications antérieures, d’habitude centrées autour de la  figure d’un maître ou d’une école régionale — ici Nantong dans le Jiangsu — ville où œuvraient les disciples de Wang Yanqing 王燕卿 (1867-1921), l’auteur du fameux manuel.

古琴初階 Guqin chujie

Avec l’ouvrage qui nous occupe ici, la situation est différente. Les milieux shanghaïens du début des années ’50 font preuve de plus d’ouverture et, dans l’ensemble, d’une approche plus scientifique.

Dès 1958, Shen Caonong 沈草農 avait rédigé un petit ouvrage destiné aux amateurs désireux d’apprendre le qin mais n’ayant pas accès direct à un maître pouvant leur enseigner cet art difficile. De son côté, à peu près à la même époque, Zha Fuxi 查阜西publie un article conséquent où il expose les notions de base de cette pratique instrumentale. Très vite, l’idée allait germer de combiner les deux écrits. Zha Fuxi demande alors à Shen Caonong et Zhang Ziqian 張子謙, des amis de longue date, de refondre les deux ouvrages pour produire un manuel pratique qui comporterait toutes les informations nécessaires à l’apprentissage du qin, assorti de plusieurs morceaux tirés du répertoire courant, mais également de toute une série d’exercices préparatoires, un peu à l’image des «gammes» dans la pédagogie du piano. Il se démarquait ainsi de l’enseignement traditionnel qui abordait la technique directement à travers les mélodies du répertoire.

Ce manuel, rédigé avec soin dans une langue particulièrement accessible, touche à presque tous les sujets qui pourraient intéresser le novice, cela sans concession, avec une exigence qui fait, encore de nos jours, l’admiration du lecteur… mais peut aussi faire rêver tout musicien en quête d’instrument: