Addendum

L'IMMORTEL DES EAUX

SHUIXIAN CAO 水仙操

L'IMMORTEL DES EAUX (AUDIO)

par Tsar Teh-yun (Cai laoshi)

L’immortel des eaux

SHUIXIAN CAO 水仙 操

Une autre histoire de barque – sur la mer cette fois –, celle de Cheng Lian emmenant son élève Bo Ya sur l’île de Penglai, la résidence des immortels. Histoire initiatique, maintes fois racontée dans les préfaces au morceau intitulé «L’Immortel des eaux». Elle évoque l’Éveil de l’élève au contact de la Nature.

La très sobre introduction à cette oeuvre publiée en 1893 par le moine bouddhique Yunxian, adepte du chan (zen) et du qin, n’évoque ni le voyage sur l’eau des deux musiciens, ni le trouble de Bo Ya abandonné sur l’île par son maître. Il va directement au coeur du sujet: la mer, son immensité et sa constante rumeur.

«… en écoutant les vagues, il comprit soudain le sens réel du qin

Écume des vagues dans la brume, Ma Yuan 馬遠, c. 1160-1225

Écume des vagues dans la brume, Ma Yuan 馬遠, c. 1160-1225

Ce morceau, Cai laoshi le jouait magnifiquement. Elle l’enseignait volontiers à ses élèves lorsqu’elle les sentait prêts. Un jour faste du mois d’août 1980, elle donna, coup sur coup, deux très beaux enregistrements: l’«Immortel des eaux» et la deuxième et splendide version de ses «Nuages sur l’eau des rivières Xiao et Xiang».

L’immortel des eaux · Shuixian cao 水仙操 · 06:17

par Tsar Teh-yun / Août 1980

«Mon maître réside dans les mers. Il a le pouvoir de métamorphoser les émotions humaines…»

Loin des lacs et des rivières, en pleine mer de l’est, un maître emmène son élève vers l’île des immortels. Là, confronté aux forces de la nature, il reçoit son initiation.

Ce morceau intitulé «L’immortel des eaux», possède un autre titre, indique Cai laoshi dans une note en petits caractères, un titre différent pour une même mélodie. Il ne s’agit plus de mer ou d’île tempêtueuse, mais d’une longue série de questions d’ordres cosmologique et mythologique posées au Ciel par Qu Yuan (340-278 av.J.C.), le premier grand poète de la littérature chinoise: «Qu Yuan questionne le Ciel».

Pour bien des mélodies l’interchangeabilité des titres de sections est monnaie courante, elle dépend de l’inspiration poétique des interprètes et des éditeurs de partitions («Le chant du pêcheur», avec toutes ses variantes textuelles, en donne un bon exemple.)

Ici, cependant, c’est le titre et le sujet mêmes du morceau qui changent alors que la musique reste inchangée. On peut à la rigueur imaginer la révélation du jeune Bo Ya sur son île comme étant une réponse totale du Ciel aux questions existentielles du vénérable poète. Mais les choses se compliquent lorsqu’on apprend que ce même morceau, outre son deuxième titre, en possède encore, dans certains recueils, un troisième: «Chant d’automne à la frontière». C’est du reste sous cette appellation qu’il apparait dans la tablature transmise par Pei Jieqing à Shen Caonong, le maître de Cai laoshi. C’est également sous ce titre que ce musicien à enregistré le morceau pour Zha Fuxi en 1956.

Écume des vagues dans la brume, Ma Yuan 馬遠, c. 1160-1225

Des vagues en cascade, Ma Yuan 馬遠, c. 1160-1225